Les femmes libanaises font face à la crise par leurs propres moyens

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Posté sur août 07 2023 10 minutes de lecture
Les femmes libanaises font face à la crise par leurs propres moyens

La vie est devenue plus difficile pour les femmes libanaises en même temps que l’aggravation de la crise et la violence économique qui les touchent durant cette situation critique. Les femmes ont commencé à rechercher des espaces privées et des projets économiques productifs, pour atteindre une sorte d’indépendance financière. En partant des projets sportifs et culturels jusqu’au  domaine de la cuisine, les femmes ont adopté plusieurs initiatives dans les régions périphériques. En plus, un répit sportif est réservé aux hommes, notamment dans les régions libanaises périphériques.     

Certaines autorités locales ne prêtent pas attention aux besoins des femmes et à l’importance de leur participation aux activités économiques ou sociales dans quelques municipalités, villes et régions périphériques. C’est pourquoi, plusieurs initiatives menées par des femmes sont actives à tous les niveaux. Certaines femmes essayent de faire entendre leur voix pour dire qu’ « elles existent et qu’elles sont productives dans les aspects économiques, culturels, sociaux et sportifs. »

En se basant sur le mot « Mayli, » qui constitue une invitation adressée aux voisines à prendre un café, un groupe de femmes à Baalbek a établi une librairie et un café pour les femmes sous le nom de « Mayli » pour créer une place confortable, de laquelle les filles et les femmes peuvent profiter pour étudier, travailler, s’amuser et parler. 

La jeune fille, Mohad Haidar, (28 ans) n’estimait pas que la cérémonie de lancement de la librairie et du café « Mayli » trouverait un très grand écho sur les réseaux sociaux grâce aux lettres de bienvenue et d’encouragement et aux dons des livres pour la librairie qui a annoncé avoir reçu des apports des livres culturels et féministes. Haidar a déclaré que le premier objectif était d’établir un refuge pour les femmes de Baalbek, autrement dit cet endroit va devenir une station ou un rassemblement pour discuter et s’amuser en buvant une tasse de café et d’autres boissons sans être violées par les hommes de la région, soient des harceleurs ou ceux qui interviennent dans la vie des femmes et déterminent leurs choix.  Dans la plupart des cas, les femmes de Baalbek et d’autres régions sont soumises à l’autorité familiale et parentale. L’ouverture de la librairie et du café a irrité  certains habitants de la ville. Les propriétaires de « Mayli » sont accusées de discrimination sexiste, puisque l’endroit est consacré aux femmes. C’est pourquoi Haidar a indiqué que les endroits à Baalbek sont réservés aux hommes, tels que les rues, les places, les maisons et quelques cafés. Ces femmes seront le centre d’attention de toutes les personnes en ce qui concerne leur discussion et comportement, bien que les endroits pour les femmes soient limités. L’idée de « Mayli » présente une percée pour la priorité d’établir des endroits pour les femmes afin de réunir et révéler leur identité.

En plus, l’annonce de l’ouverture du café et de la librairie a été accompagnée d’une attaque électronique via des faux comptes sur la page Instagram du café, dans le but de perturber les activités des femmes.  Haidar a souligné que « l’objectif de Mayli » n’est pas d’être  un acte de provocation dans la région, et cet endroit est disponible pour les femmes de différentes appartenances sociales, religieuses et politiques. Cet endroit ne consiste pas à faire croire aux slogans féministes qui font fuir certaines personnes, mais un endroit pour les femmes à être elles-mêmes loin des yeux des harceleurs et pour partager les expériences et la connaissance participative avec elles. » Le café fonctionne selon les souhaits des femmes. Si elles veulent apprendre un métier du tricot et de couture, n’importe quelle femme pourra se porter volontaire pour enseigner les femmes ce métier et toute autre activité qu’elles souhaitent apprendre. L’objectif n’est pas seulement culturel, mais il est également un endroit pour le confort et les loisirs. 

La recherche des espaces publiques n’est pas limitée au rencontre et au rassemblement, mais elle s’étend également à la pratique de certaines activités sportives dans des régions sportives périphériques. Alaa Abdul Baqi (21 ans), une habitante au village du Joub Jannine à Bekaa a pu établir une équipe sportive de Basketball et de s’entraîner une fois par semaine. 

L’histoire d’Alaa a commencé à l’école puisqu’elle jouait au football. Pendant son adolescence, son professeur de sport l’orientait vers l’entraînement de Basketball puisque ce genre de sport est plus recommandé pour les filles. La famille d’Alaa n’aimait pas le fait qu’elle soit impliquée aux jeux sportifs, « puisqu’ils sont des jeux masculins ». Ils la traitaient de garçon manqué pour mettre en évidence la masculinité de ce jeu. » La passion d’Alaa pour les jeux sportifs et le manque de filles pour jouer avec elle pendant son adolescence l’ont poussé à faire face au harcèlement de la part de ses proches et sa famille qui lui ont demandé de cesser de jouer et de se concentrer sur son éducation. Mais elle a fait comme si de rien n’était, et elle a continué. Depuis un an et demi, Alaa est en train d’entraîner les filles du village. Elle est également impliquée dans le Rassemblement démocratique des femmes libanaises (RDFL), qui lui a fourni le soutien et la logistique nécessaires au développement de son travail. "Les femmes des régions de la Beqaa n'ont pas un répit. Mon équipe de sport unit les filles non uniquement en raison de leur passion pour le sport, mais parce que c'est un espace où elles peuvent décharger leur énergie, partager leurs préoccupations et leurs problèmes, et discuter des solutions qu'elles pourraient trouver."       

L'équipe féminine qui s'entraîne sur le terrain de jeu du village est victime d’harcèlement, puisque le terrain est public et ne peut être loué. Lorsque les garçons attendent leur tour pour jouer, ils font des commentaires moqueurs : "Il est évident que vous ne savez pas jouer et que vous n'avez pas de championnats. Cependant, cela ne les empêche pas de poursuivre leur passion pour les jeux sportifs. Alaa reçoit beaucoup de commentaires positifs vu qu’elle est en train de changer les habitudes des filles qui s'entraînent avec elle, notamment leur capacité à prêter attention à leurs loisirs et à trouver un espace pour se réunir. De nombreuses filles ont même placé un panier de basket pour jouer à la maison et continuer à s'entraîner en permanence. Le plus grand rêve d'Alaa, qui cherche à travers son activité féministe et sportive à changer la mentalité existante dans la région, où les activités sportives sont réservées aux hommes, est de créer une académie de sport dans la région et d'entraîner les différentes tranches d'âge. Paradoxalement, la spécialité universitaire d'Alaa est très éloignée de ses loisirs, puisqu'elle étudie toujours les mathématiques.     

Dans la ville du sud Bint Jbeil, Fatima Makki, ne s’imaginait pas sortir de chez elle pour travailler puisque son époux refusait l’idée. Toutefois, depuis la crise économique en 2019 et le ralentissement du travail de son époux, le travail de Fatima est devenu une nécessité pour assurer leurs besoins quotidiens et le traitement de leur fils unique.   

La société coopérative de la ville « El Zawde » était le seul recours pour Fatima afin de travailler, vendre, produire, promouvoir les fournitures locales. La coopérative a été établie en 2007, par Ghada Bazzi, en coopération avec plusieurs femmes et avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour assurer des opportunités de travail aux les femmes et les rendre productives au niveau économique. Fatima déclare que: " son travail à la coopérative lui a permis d'avoir une chance d'accès aux cours de cuisine et de production locale. La société constitue un marché des grandes entreprises qui se repose sur les émigrés. Elle a réussi à participer à plusieurs expos de produits ruraux dans la capitale. La coopérative élargit l'horizon de Fatima et avère son rôle productif dans la vie."

En plus, Fatima dit que le travail collectif des femmes est similaire au travail de la société familiale qui dépend de coopérer, partager, résoudre les problèmes et atténuer la pression à laquelle sont soumise les femmes."

Toutefois, la fondatrice de la société, Ghada Bazzi, a affirmé que la société est capable de vendre les produits dans la région et d'établir un cycle économique caractérisé par la production organique qui évite l’utilisation des produits chimiques dans l'agriculture et la production. C'est ce qui distingue le travail de la société et établir également un marché à vendre les produits, notamment pour les émigrés.    

  Le coronavirus conduit la jeune fille Souhad Hamiyeh (33 ans) de Kfarhatta, du Liban-Sud à quitter son emploi et se retrouver au chômage. Par conséquent, elle cherche un emploi alternatif.

Comme les entreprises ont fermé, elle a profité du fait qu'elle a une voiture pour annoncer qu'elle devient un chauffeur-livreur dans le village et transporter les habitants qui n'ont pas les moyens d'avoir une voiture pour les emmener à leur destination.   

Elle assure les besoins des femmes du village. L’activité de Souhad a eu un écho positif dans le village, puisqu’elle était la première fille qui exerce une telle profession. Souhad a affirmé que chaque femme doit être indépendante au niveau financier et de ne jamais avoir honte de sa profession et de son métier. Souhad reçoit des commentaires positifs de leurs clients puisqu’elle est capable de répondre rapidement à leurs besoins et à cause de son sens de responsabilité.

Ce moyen de transport permet aux filles du village de se déplacer en toute sécurité, sans être harcelées ou agressées verbalement. Souhad dit que sa voiture est semblable à une personne qu’elles font confiance, puisqu’ elle a pu créer de nombreuses amitiés avec les habitants du village, en particulier avec les filles. Elles ont commencé à partager leurs discussions, leurs problèmes et ce à quoi elles étaient confrontées. 

En plus, les enfants du village aiment circuler en voiture avec elle, chaque fois qu’ils la voient quelque part, ils lui donnent un câlin puisqu’ils l’aiment. 

Au village de Baakline, Chouf, Nadia Bou Matar transforme sa profession d’enseigner l’anglais en confiserie qu’elle a nommé « The English Teacher Bakes » inspiré de son travail principal et de son rêve de transformer le monde de cuisson et de sucreries en fabrique ou en cuisine de confiseries. Bou Matar a commencé son travail il y 6 ans en faisant la promotion de ses activités en ligne. Son activité a été limitée à Baakline et à la région voisine. Elle a réussi à attirer des clients locaux qui préfèrent la nourriture faite maison. 

Dans son travail, elle ne compte pas sur l’achat de n’importe quel objet du supermarché. Elle prépare tous les ingrédients des gâteaux, toute seule sans recourir aux aliments en conserve, y compris les conservateurs contrairement aux pâtisseries. Après 6 ans du travail dans la région du Chouf, Bou Matar a décidé d’ouvrir son magasin dans la région de Saifi à Beyrouth puisque le nombre de clients a augmenté grâce à sa commercialisation en ligne. L'objectif futur de Bou Matar est d'élargir son activité au Liban et à l'étranger. De plus, Bou Matar a déclaré que son travail lui permet d’acquérir une plus grande indépendance, puisqu'aucun employé ne gère son entreprise et qu'elle est entièrement responsable de son travail.   

Les conditions et les capacités de chaque femme sont différentes dans toutes les régions libanaises. Cependant, les femmes des zones rurales déploient des efforts supplémentaires pour faire leurs preuves, atteindre leur indépendance financière et sociale et essayer de changer le stéréotype qui vise les femmes, à noter qu'elles sont vulnérables et soumises au système paternel masculin.
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