Ces trois dernières années étaient inhabituelles pour les libanais. Au Liban, le critère « normal » est modifié pour signifier : vivre avec le moins de pertes, sachant que le b.a.-ba de droits sont désormais des souvenirs que nous interprétons par les expressions suivantes : « Souvenez-vous des jours ou le dollar était à 1,500 livres libanaises ? » La réjouissance de ces droits nécessite un billet d’avion ou n’importe quelle devise étrangère, en sus de la dépréciation monétaire, que ce soit pour immigrer ou passer quelques jours dans un pays dit « normal. »
Le plus grand nombre de libanais ou les détenteurs de la livre libanaise et non de la devise étrangère, ne peuvent que s’adapter et cohabiter avec la réalité. Sociologiquement, les personnes peuvent s’adapter à toutes les circonstances malgré les grandes différences entre les communautés et les différences individuelles entre les membres de la même communauté.
Les rapports soulignent qu’au Liban, pratiquement chaque jour, nous vivons pour survivre ! C’est tout. « Le peuple libanais est l’un des peuples les plus déprimés au monde, l’inflation atteint des taux très élevés et les pauvres souffrent de plus en plus chaque mois… » Ce sont des exemples de ce que nous subissons au quotidien, tout en transformant ces actualités régulières en plaisanteries : « Nous espérons être à la première position et dépasser l’Afghanistan ».
La solidarité du peuple… est la seule solution
Les libanais ont réalisé que la solidarité est leur seule solution. La solidarité a été traduite par les protestations du 17 octobre avant que le pouvoir politique gagne et affaiblisse la plupart des demandes. Cette solidarité ou lutte, n’était qu’une expression qui chatouille les sentiments, mais qui se transforme en initiatives individuelles qui jouent un rôle primordial pour relever les conséquences du 4 août et réduire les impacts de l’effondrement économique.
Les initiatives individuelles sont tellement éloignées du rôle des associations que la plupart d’entre elles se fondent sur le financement fourni par les entités et les organisations internationales. Les initiatives individuelles sont entraînées par les efforts d’un groupe de « personnes motivées » qui espèrent que leurs efforts permettront d’atténuer les impacts de la crise subis par leurs proches.
Telles initiatives se multiplient dans les regions vulnérables qui souffrent de la marginalisation qui a doublé dès le début de la crise, fin de 2019. Cette problématique ne signifie pas que les initiatives individuelles sont absentes à Beyrouth et dans les grandes villes, mais elles existent parallèlement au rôle de certaines associations, institutions et familles contrairement aux Banlieues. Selon les personnes chargées de ces efforts, les allocations payées par les parties politiquesn’existaient pas dans la plupart des régions après les élections parlementaires (mai 2022), ce qui pousse les personnes à rechercher des solutions individuelles.
Ces initiatives sont lancées dans chaque ville au Chouf et à Aley, malgré leur rareté durant la période antérieure à la crise puisqu’elles se sont limitées à quelques activités d’animation et à l’organisation des visites et des spectacles. Aujourd’hui, ces initiatives se sont traduites par la recherche de médicaments, l’aide fournie aux groupes les plus pauvres et la prise en charge des coûts minimaux de l’éducation des élèves d’écoles publiques, tels que les primes de transport… jusqu’à la réalisation de certaines interventions chirurgicales pour les habitants du village.
« Mecherfeh le club de jeunes » : la priorité est pour les habitants
Mecherfeh le club de jeunes est parmi les initiatives importantes dans le Caza d’Aley qui cible toutes les tranches d’âge des habitants du village. Le club a été fondé en 2017 par un groupe de jeunes filles qui cherchaient à redonner vie à leur calme village qui manquait de toute sorte d’activités. Le Mecherfeh est un village de montagne dans le Caza d’Aley et il est d’environ 30 kilomètres loin de la capitale Beyrouth. Le club se compose maintenant de 40 jeunes garçons et filles. Son objectif principal est de sensibiliser les membres en les engageant à la participation sociale. En 2020, le club a déployé des efforts pour aider les habitants pendant la période de quarantaine en distribuant des aides médicales et en sensibilisant la population aux risques du corona virus. Ramona Sarriedine (25 ans), le fondateur du club dit que la période de quarantaine était un changement fondamental dans leur rôle au niveau du village. Le club était au courant de la crise de pénurie de médicaments au Liban. Les membres du club travaillaient sur fournir les médicaments des associations turques et américaines aux habitants sous la surveillance de docteurs. Le club soutient maintenant les agriculteurs en fournissant les semences et les pesticides nécessaires à la récolte. Selon Ramona, « le club cherche toujours à habiliter les femmes du village en les impliquant dans le secteur industriel. » Le club se fonde sur les expatriés et certains habitants en termes de financement, en complément de certaines activités d’animation détenues à des prix symboliques dans le but d’apporter une aide au fonds. La formation des premiers secours pour les groupes de jeunes est l’une des formations récemment organisée par le club, en coopération avec le croix rouge libanais, parallèlement à la sensibilisation aux risques de l'intimidation et le harcèlement pour les tranches d’âge les plus jeunes.
Ramona dit que les fondements du club sont de rester loin de la politique, surtout que les tendances politiques sont différentes parmi les habitants de Mecherfeh. Enfin, elle dit:" les habitants du village font confiance aux membres du club et cela se manifeste par leur ouverture d'esprit à la collecte d'informations durant certaines activités.
L'initiative "Beit Al Khair : une solidarité entre les jeunes pour faire face à la crise de médicaments.
La crise de médicaments pourrait être l’une des plus importantes crises depuis le début de la crise libanaise. Les patients ont fait face à une période difficile qui a duré des mois. La situation atteint un stade où certains patients sont décédés à cause du manque de médicaments aggravé dans les regions vulnérables, qui manquaient déjà d’un minimum de services médicaux et sanitaires.
Le village d’Aghmid dans le Caza d’Aley (36 kilomètres loin de Beyrouth) est parmi ces regions qui manquent de pharmacies et dispensaires… ainsi que des médecins et des employés du secteur sanitaire. Les habitants du village souffraient d’un niveau de « stress élevé » pendant la crise de pénurie de médicaments. L’aide partisane n’était pas suffisante en raison du besoin élevé de différents types de médicaments pour les maladies chroniques et incurables.
Dans ce but, l’initiative « Beit Al Khair » a été lancé en 2020 par des jeunes filles et garçons du village, ayant trouvé que leur solidarité est la seule solution. Premièrement, les responsables travaillaient pour remplir les applications pour déterminer les médicaments nécessaires et les personnes qui en ont le plus besoin. La communication s’est déroulée avec la municipalité qui facilite leur travail en mobilisant ses capacités limitées afin de fournir les principaux médicaments pour les habitants. L’initiative n’était pas limitée à fournir des médicaments pendant la période de pénurie, mais elle prenait aussi à sa charge de distribuer des cadeaux aux enfants pendant les fêtes. L’initiative a également organisée un évènement d’animation pour les enfants et un jour pour les femmes du village à l’occasion de la fête des mères.
Sarah Bou Ghader (29 ans), un membre actif de l’initiative, a affirmé que l’initiative a été fortement appréciée par les expatriés et ceux qu’elle nomme « les mains bienfaisantes. »
Cependant, avec les prix actuels élevés des médicaments en raison d’enlèvement du soutien gouvernemental, l’enthousiasme à aider est devenu plus faible à cause de plusieurs facteurs, notamment le long terme de la crise. Selon Sarah, le nombre des bénéficiaires est aujourd’hui inferieure au nombre qui s’élevait de 40 individus au début de la crise.
Sarah dit que « les membres de l’initiative travaillent maintenant sur les publicités, puisqu’ ils espèrent qu’ils peuvent assurer une partie du financement nécessaire pour fournir les principaux médicaments requis par les habitants. » En outre, l’initiative organise certaines activités qui ont pour but de financer les fonds de « Beit Al Khair, » tels que la vente de vêtements et le calendrier annuel pendant le réveillon du Nouvel An.
L’indépendance des femmes fait l’objet d’une initiative au Chouf
« Nous n’avons pas choisi un nom pour notre initiative et nous n’avons pas publié aucune photo sur les réseaux sociaux, quand nous avons rendu compte que notre seule solution est d’aider les habitants de Bekaata et de la région voisine, » dit Rima Zebian (50 ans), une activiste sociale. En 2022, Rima a établi avec un certain nombre d’amis (es) et de proches, une initiative pour soutenir les femmes dans le Caza du Chouf. La caractéristique la plus importante de cette initiative était d’aider les femmes dans leur travail plutôt que de se contenter des allocations financières.
L’initiative se fonde principalement sur les transferts des expatriés et cible les femmes travaillantes dans la nourriture faite maison, tels que la mélasse de grenade et d’eau de rose, etc. en mettant à leur disposition les matières premières. Selon Rima « beaucoup des femmes ne peuvent pas assurer les matières premières puisque les prix sont élevés, ce qui nous conduit à les soutenir afin qu’elles ne perdent pas leur source de revenu décent. »
Environ 35 femmes bénéficient de cette initiative. Les responsables de l’initiative ont assuré que ces femmes manquent de toute source de revenu ou tout autre type d’allocation. Rima a affirmé que les femmes se sentent indépendantes grâce à leur travail et elles rateraient ce sentiment si elles se contentaient seulement des allocations financières.
En outre, l’initiative travaille pour assurer des aliments emballés, y compris les légumes, les fruits, les viandes et les céréales aux femmes qui souffrent d’une situation sanitaire difficile et sans patriarche.
Pendant la fête de l’Aïd-el-adha, les responsables de l’initiative ont aidé les femmes travaillantes dans la préparation des confiseries et des sucreries en leurs assurant les matières premières et en achetant les sucreries.
Ces initiatives ne compensent pas l’absence de l’Etat et ne sauvent pas les libanais des conséquences de la tragédie économique qui a beaucoup duré, tout en prévoyant qu’elle dure plus longtemps. Toutefois, ces initiatives peuvent promouvoir la solidarité en se basant sur la règle suivante « la crise réunit les personnes » même si la plupart de ces initiatives est limitée. Les initiatives accroissent avec l’aggravation de la crise de sorte qu’avec chaque crise, il y a une initiative qui réduit ses impacts… sauf les initiatives entièrement confidentielles qui sont limitées à aider les personnes les plus vulnérables « en silence. »