Fléau croissant et réponse insuffisante
Dans les années 1990, on estimait que seuls 10 % des enfants qui risquent d’être maltraités bénéficiaient d’un soutien(9) et d’une prise en charge appropriés en termes d’alerte et de dénonciation(10). Actuellement, selon les données de l’OMS, seul un nombre limité d’enfants exposés à la maltraitance bénéficie d’un suivi minutieux(11). Il convient de noter que les établissements pédagogiques, telles que les crèches et les écoles, ont de mauvaises structures médico-sociales pour prendre en charge la maltraitance des enfants. Par conséquent, elles ne semblent pas pouvoir jouer un rôle décisif dans la détection et le signalement de ces cas(12), les abus étant commis en majorité au sein et en dehors du cadre familial(13). Le pourcentage d’enfants exposés à la violence a également augmenté de manière spectaculaire avec la situation difficile des enfants réfugiés.
Avec la crise croissante des environnements dangereux pour de nombreux enfants dans le monde, les enfants migrants et déplacés sont exposés aux pires formes de maltraitance et de risques. Souvent tributaires du trafic humain, ils peuvent facilement être victimes de trafiquants et d’autres criminels. Nombre d’entre eux sont soumis aux pires formes de maltraitance et de privation durant leurs voyages. Au cours des dernières années, près de 50 millions d’enfants ont migré dans le monde, à travers les frontières ou ont été déplacés de force – et ceci est une estimation prudente. Plus de la moitié de ces filles et garçons ont fui la violence et l’insécurité, soit 28 millions au total. Ces enfants peuvent être des réfugiés, des déplacés à l’intérieur de leur propre pays ou des migrants, mais ils sont avant tout des enfants : peu importe d’où ils viennent, qui qu’ils soient et sans exception.
En toutes circonstances et par tous les moyens d’existence, les enfants malheureux sont la honte d’une humanité défaillante.
Les enfants dans les conflits armés sont tués, mutilés, kidnappés, déplacés, maltraités, négligés, persécutés, exploités, trafiqués, appauvris, séparés et forcés au travail.
Les enfants ne sont pas responsables des bombes et des balles, de la violence des gangs, de la persécution, des récoltes ratées et des bas salaires des familles qui les chassent. Cependant, ils sont toujours les premiers à être touchés par la guerre, les conflits, le changement climatique et la pauvreté.
Dans ces contextes, les enfants sont au nombre des personnes les plus vulnérables de la planète. Cette vulnérabilité ne fait que s’aggraver. Le nombre d’enfants réfugiés sous le mandat du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a plus que doublé en l’espace de dix ans. Ces statistiques choquantes sont tout simplement inacceptables.
Selon une étude récente des Centres de contrôle et de prévention des maladies aux États-Unis (CDC) publiée dans Pediatrics, la majorité des décès sont évitables(14) et plus de la moitié des enfants dans le monde – soit un milliard d’enfants âgés entre 2 et 17 ans – ont subi une forme de violence au cours de l’année écoulée(15).
Que devons-nous faire?
Conscients de la nature intrusive et injuste de la MNE et de la VCE, presque toutes les nations (196) ont ratifié la Convention des Nations Unies de 1989 relative aux droits de l’enfant, qui reconnaît le droit de vivre sans violence comme un droit fondamental des enfants. Aujourd’hui, plus de vingt-cinq ans plus tard, l’ONU a lancé un nouvel agenda pour le développement durable visant à mettre un terme à toutes les formes de violence faite aux enfants(16).
Plusieurs de ces Objectifs du développement durable 2030 sont pertinents pour ce qui est de l’objectif visant à mettre fin à la violence exercée contre les jeunes et les enfants(17). Les nouveaux partenariats devraient tirer parti de cette dynamique ainsi que de la prise de conscience croissante des effets toxiques de la violence sur le développement cérébral.
Le Partenariat mondial pour mettre fin à la violence exercée contre les enfants a un rôle crucial à jouer pour aider le monde à atteindre l’objectif mondial 16.2. Ce livre fait partie d’une telle stratégie(18). Il constitue aussi un outil de formation. La Société internationale pour la prévention des abus et de la négligence faite aux enfants (ISPCAN) a mis au point des modules et du matériel pédagogique pour soutenir sa mission visant à créer à travers le monde des systèmes durables de prévention, de protection et de traitement de la violence faite aux enfants(19).
Les professionnels des services sociaux, des forces de l’ordre et des tribunaux sont aussi les bienvenus et sont encouragés à participer à ce programme(20). Celui-ci est de nature médicale. Il mettra donc à la disposition de ces professionnels un large éventail d’informations et de compétences dont ils ont besoin pour leur rôle spécifique de protection des enfants. Il fournira également, sur base de ressources multiculturelles, une base de connaissances sur les problèmes médicaux et psycho-sociaux, afin que les professionnels de la santé (mais aussi d’autres secteurs concernés) puissent mieux comprendre comment aider au mieux les enfants(21).
(1) iUNICEF. (2012). Inequities in Early Childhood Development: What the data say. Multiple Indicators Cluster Surveys. New York, NY: UNICEF.
(2) Medline Plus. U.S. National Library of Medicine,. 2008-04-02.
(3) Equality, development and peace. New York, NY, United Nations Children’s Fund, 2000.
(4) Shalhoub-Kevrkian N. The politics of disclosing female sexual abuse: a case study of Palestinian society. Child Abuse & Neglect, 1999, 23:1275– 1293.
(5) Sidebotham P, Golding J. Child maltreatment in the ‘‘Children of the Nineties’’: a longitudinal study of parental risk factors. Child Abuse & Neglect, 2001, 25:1177–1200.
(6) Schein M et al. The prevalence of a history of sexual abuse among adults visiting family practitioners in Israel. Child Abuse & Neglect, 2000, 24:667–675.
(7) Oral R et al. Child abuse in Turkey: an experience in overcoming denial and description of 50 cases. Child Abuse & Neglect, 2001, 25:279–290.
(8) Xu J, Murphy SL, Kochanek KG, Arias E. Mortality in the United States, 2015. NCHS Data Brief, No. 267. Hyattsville, MD: National Center for Health Statistics; 2016.
(9) Felitti VJR, Anda R, Nordenberg D, et al. Relationship of childhood abuse and household dysfunction to many of the leading causes of death in adults: the adverse childhood experiences (ACE) study. Am J Prev Med. 1998:14(4):245–258.
(10) Runyan DK et al. Children who prosper in unfavorable environments: the relationship to social capital. Pediatrics, 1998, 101:12–18.
(11) RF, Butchart A, Felitti VJ, Brown DW. Building a framework for global surveillance of the public health implications of adverse childhood experiences. Am J Prev Med. 2010;39(1):93–98pmid:20547282.
(12) J.A.Usta, Z.R.Mahfoud, G.AbiChahine, G.A.AnaniChild Sexual Abuse : The Lebanese situation , 2008.
(13) Olds D et al. Preventing child abuse and neglect: a randomized trial of nurse home visitation. Pediatrics, 1986, 78:65–78.
(14) Centers for Disease Control and Prevention. Up to 40% of annual deaths from each of five leading US causes are preventable. https://www.cdc.gov/media/releases/2014/p0501-preventable-deaths.html Accessed January 30, 2017.
(15) World Health Organization, United Nations. Global Status Report on Violence Prevention 2014. Geneva, Switzerland: WHO Press; 2014.
(16) Ibid.
(17) United Nations. (2015). Transforming Our World: The 2030 Agenda for Sustainable Development. Resolution adopted by the General Assembly on 25 September 2015. Available at: undocs.org/A/RES/70/1 (accessed April 2016).
(18) Transforming Our World: The 2030 Agenda for Sustainable Development. United Nations General Assembly; Seventieth Session. September 18, 2015; New York, NY.
(19) Children’s Bureau. The national child abuse and neglect data system 1998. Washington, DC, United States Department of Health and Human Services, 1999.
(20) Ludwig S. Child abuse. In: Textbook of Pediatric Emergency Medicine. 4th ed. Philadelphia, PA: Lippincott Williams & Wilkins; 2000:1669-1704.
(21) Levesque RJR. Sexual abuse of children: a human rights perspective. Bloomington, IN, Indiana University Press, 1999.