Face à la crise de propagation du coronavirus, ce sont les jeunes, les étudiants et les nouveaux diplômés au Liban qui ont lancé la plupart des initiatives volontaires visant à sensibiliser et à aider la population à respecter la consigne de confinement à domicile, et à assurer bénévolement un appui aux hôpitaux et au secteur de la santé.
Et si la caractéristique par excellence du concept de citoyenneté et de la protection de la société de l’épidémie réside dans l'engagement au confinement individuel, les initiatives des jeunes, la mise à disposition de leurs capacités et de leur dynamisme au service de la société s’inscrit, elle, dans le cadre de la fougue indispensable au volontariat dont cette catégorie de personnes fait preuve, ainsi que de sa maîtrise des moyens de communication susceptibles de faire connaître ses initiatives et de polariser l’attention sur elles, misant ce faisant sur sa condition physique et ses réserves immunitaires face au virus.
De fait, la détermination des jeunes, en particulier des étudiants, seuls ou en groupe, à s’engager dans différentes formes de travail organisé lancés par des associations ou des ministères, pour faire face aux crises successives que traverse le Liban, démontre la capacité de ce groupe à incarner le modèle le plus proche du concept de citoyenneté, dans sa dimension d’appartenance à une nation ou une « oumma ».
Les initiatives bénévoles des jeunes, que ce soit pendant la crise de propagation du coronavirus, ou lors des incendies qui ont éclaté avant le soulèvement du 17 octobre, ou encore pendant l'intifada elle-même, ont démontré leur volonté de surmonter les frontières identitaires, régionales et confessionnelles tracées par la guerre civile au Liban, ainsi que la problématique de l’exercice des droits politiques et électoraux dans les lieux de résidence et de leurs rapports à l'espace géographique, en particulier dans la capitale Beyrouth, ainsi que la problématique des multiples affiliations partisanes et confessionnelles qui marquent l'identité de chaque citoyen libanais.
Des différentes dimensions de la citoyenneté, politique, économique et culturelle, sa dimension sociale d’allégeance et de solidarité entre les individus est peut-être la dimension la plus accomplie au Liban. Cette dimension correspond ou recoupe le septième niveau de participation des jeunes aux responsabilités citoyennes nationales, développé par le psychologue américain Roger Hart. À ce niveau de participation, les jeunes s’orientent vers la mise en œuvre de leurs décisions, projets et idées invitant les adultes à les soutenir, ou parfois même se passant de leur concours.
Il existe de nombreux exemples de participation des jeunes au volontariat face au Covid-19, au niveau national. Citons à ce sujet le lancement d'initiatives et de campagnes de sensibilisation sur les réseaux sociaux, certains jeunes ayant créé des pages de sensibilisation au virus et des moyens de le prévenir. Des dizaines de jeunes de Beyrouth et de diverses régions ont également pris l'initiative de se porter volontaires pour des services de livraison à domicile gratuits, en publiant leurs numéros de téléphone pour passer les commandes, dans le but d'encourager les citoyens à rester chez eux, à respecter les mesures de confinement et à éviter qu’il n’y ait foule dans les magasins. Des volontaires se sont regroupés pour échanger leurs expériences au sujet des méthodes de protection disponibles, masques, gants et matériel de stérilisation, se mettant en contact avec la Croix-Rouge libanaise pour assurer des cours de formation aux volontaires.
Le modèle du pluralisme et de diversité de l'Université libanaise (UL) comme porte d’entrée à la réalisation de la citoyenneté au niveau national est apparu dans le rôle joué par ses étudiants qui ont pris les devants du volontariat face à l’épidémie virale. Ainsi, des étudiants en médecine de l'UL, auxquels se sont joints des étudiants de l'Université arabe de Beyrouth, ont assuré des permanences dans la section coronavirus de l'hôpital universitaire Rafic Hariri, considéré comme le premier centre à assurer l’accueil, le test gratuit et les mesures d’isolement aux patients atteints par la virus. Les étudiants de la Faculté de santé publique de l'UL et ses infirmières et infirmiers diplômés ont annoncé pour leur part qu'ils se porteront volontaires pour visiter des maisons et servir les patients atteints de maladies chroniques. Les étudiants en chimie de l'UL ont également lancé une initiative pour la désinfection des établissements commerciaux, en coordination avec les étudiants en médecine. Cette initiative visait à aider les propriétaires de petits et moyens établissements.
La pénurie de matériel respiratoire dont souffrent différents pays a conduit un certain nombre d'étudiants en génie et d’ingénieurs diplômés à se lancer dans la fabrication de respirateurs, dans le cadre d’une initiative baptisée « un respirateur pour tout le Liban ». L'initiative a conduit à la constitution d’une cellule de crise scientifique comptant plus de 270 spécialistes d’horizons divers, que le ministère de l'Industrie a pris en charge. Sa mission : produire des respirateurs avec les matériaux disponibles sur le marché, recenser les appareils existants et réparer leurs pannes et défectuosités. Une plateforme électronique a également été lancée pour développer des prototypes de respirateurs, thermomètres à distance et poignées de protection. Une initiative d'une équipe d'ingénieurs et de programmeurs s’est également formée pour développer une application mobile destinée à assurer les liaisons de la population, dans les quartiers résidentiels, à des points de services de livraison.