" Je supervise actuellement la culture de 12 dounoms et j’ai eu recours à un certain nombre de réfugiés syriens habitant le voisinage ", a ainsi affirmé Abou Hussein, un agriculteur de Aïtaroun âgé d’une soixantaine d’années, au correspondant de l’Agence nationale d’information.
" Cultiver le tabac est fatiguant, et les jours ouvrables sont constitués de cycles qui se chevauchent, entrecoupés de saisons ".
Puis poursuivant sur sa lancée tout en repiquant les feuilles de tabac avec l’aide de membres de sa famille et de quelques ouvrières syriennes : " Je les ai associés à cette culture parce que les frais habituels de main d’œuvre et les dépenses diverses arrivent à peine à équilibrer la production ".
Il note que " la main d’œuvre syrienne temporaire, surtout au moment de la plantation, constitue un facteur auxiliaire qui contribue à l’augmentation de la production ".
La culture du tabac dans la région de Bint Jbeil est un moyen de subsistance pour de nombreuses familles. Elle est considérée comme l’une des cultures agricoles les plus importantes après celle de l’olive, et elle a toujours accompagné les fermiers dans les beaux et mauvais jours, avant, pendant et après l’occupation israélienne, le tout en l’absence de cultures alternatives.
La culture du tabac nécessite 16 mois de travail continu, à commencer par les semences placées en soins intensifs, à la plantation dans une bonne terre dans l’attente de la croissance, puis la récolte, le séchage, la classification et la préparation, jusqu’à la phase finale où le produit est livré à la Régie des tabacs et tombacs.
Dans sa maison du village de Kounine, Hanane repique les feuilles de tabac placées sur une table en plastique devant elle, une récolte résultant de la plantation de quatre dounoms de terre.
Elle précise : " Les coûts de la main d’œuvre sont très élevés au regard de la production. Depuis deux ans toutefois nous avons commencé à embaucher des ouvrières migrantes syriennes à qui nous versons la moitié de la paie journalière de leurs homologues libanaises, soit 20.000 LL ".
Puis elle ajoute : " Au cours des deux étapes de la récolte et du repiquage, nous payons environ 2.000 LL le ballot, mais au moins le résultat est meilleur que par le passé, grâce à l’aide ponctuelle des femmes syriennes déplacées, surtout pendant la saison des plantations.
Il y a deux ans, Bahia a fui la Syrie vers la localité de Bint Jbeil, sans jamais rien connaître sur la culture du tabac. " En seulement quelques jours, j’ai appris à ramasser les plants avec les voisins, puis nous avons aussitôt commencé à travailler ensemble dans la production ", a-t-elle confié.
Bahia et certains membres de sa famille ont fini par maîtriser tous les détails de cette culture, allant de la plantation, à la cueillette, au repiquage, puis la récolte et la collecte, à l’exception du semis de graines dans la pépinière et de la première plantation.
La jeune femme précise à cet égard, que " cette étape est difficile et nécessite de la précision, ainsi qu’une connaissance exacte des maladies qui infectent la plantation, chacune d’entre elles ayant un nom et un médicament approprié ".
La culture du tabac exige, selon un conseiller agricole de la Régie des tabacs et tombacs, " beaucoup d’expérience, de sophistication et d’accompagnement en raison des maladies qui affectent la plantation et les plants ".
Il ajoute que " le fermier doit être un familier de cette culture avec une expérience quotidienne minimale du traitement et de la surveillance, il doit aussi prendre soin de la stérilisation du sol, pulvériser les pesticides, retourner la terre, planter les graines sélectionnées à partir d’une plante saine et éviter l’agriculture intensive ". C’est pour cela que la participation des femmes déplacées syriennes reste limitée à certaines étapes spécifiques.
Pour sa part, le vice-président de la Confédération générale des travailleurs au Liban (CGTL) et président du syndicat des planteurs de tabac, Hassan Fakih, a souligné que " la culture du tabac est une agriculture domestique héritée et dispose de mécanismes liés à l’expertise et à l’exactitude pour éviter une production malsaine ".
À cet égard, il précise que " le travail de la main d’œuvre syrienne se limite le plus souvent à l’étape de la plantation ".