Engagement et participation à la vie politique, économique et sociale : le rôle des femmes au Mont-Liban

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Posté sur mars 24 2021 par Joanna Fayad, Spécialiste principale de l'intégration du genre à l'Institut arabe pour les femmes 6 minutes de lecture
Engagement et participation à la vie politique, économique  et sociale : le rôle des femmes au Mont-Liban
©Adra Kandil
À partir de la naissance du système de la Moutassarifiya en 1861 au Mont-Liban, l’histoire de la région a changé. Le Mont-Liban est passé d’une économie essentiellement basée sur l’agriculture et donc rurale à une autre basée sur l’industrie. Cette région a ainsi abrité au fil des années 58 % des industries libanaises, ce qui constitue en 2016 la plus forte concentration industrielle du pays[1].

À partir de la naissance du système de la Moutassarifiya en 1861 au Mont-Liban, l’histoire de la région a changé. Le Mont-Liban est passé d’une économie essentiellement basée sur l’agriculture et donc rurale à une autre basée sur l’industrie. Cette région a ainsi abrité au fil des années 58 % des industries libanaises, ce qui constitue en 2016 la plus forte concentration industrielle du pays[1].

Historiquement, les femmes du Mont-Liban ont toujours joué un rôle primordial, tant au niveau de la famille qu’à celui de la communauté en général et il leur a toujours été demandé de fournir un important travail. Cela incluait la participation au revenu familial à travers des travaux agricoles, des travaux de couture, le travail de la soie ou encore la garde des animaux dans les champs, en plus des travaux domestiques, comme le nettoyage, la cuisine et le fait de s’occuper des enfants, sans parler de la nécessité de s’occuper de l’époux. Tout cela était accompli alors que les femmes étaient soumises aux décisions patriarcales et à celles prises par les hommes qui jouaient le plus grand rôle dans leurs vies[2]. Mais en raison des changements dans la vie et dans l’économie qui ont réduit le rôle de l’agriculture au profit de l’industrie et qui a poussé les familles à se déplacer des villages vers les villes, le rôle des femmes a aussi changé.

L’histoire du Mont-Liban est en tout cas truffée de guerres, de conflits et de destructions, de la période de l’autonomie à travers la Moutassarifiya jusqu’à la déclaration du Grand-Liban en 1920. Et même après cette date.

Pendant la guerre, les femmes ont joué un rôle pour édifier la paix et la préserver, notamment sur le plan local et familial. En même temps, c’est elles qui se chargeaient de toutes les questions domestiques alors que les hommes étaient occupés à se battre. Bien qu’elles aient joué un rôle primordial au cours des 19ème et 20ème siècles, les femmes n’avaient pas cependant leur mot à dire, ni au sein de leur famille ni dans leurs collectivités. Elles devaient simplement exécuter les ordres des communautés dirigées généralement par des hommes. Lors des négociations pour mettre fin à la guerre, les femmes n’ont pas eu non plus voix au chapitre. Les hommes ont déclenché la guerre et l’ont faite et ce sont eux qui y ont mis un terme.

L’un des rares domaines dans lesquels les femmes et les filles pouvaient trouver une certaine égalité avec les hommes durant cette période, était celui de l’éducation. Les études montrent en effet que les Libanaises avaient un accès facile à l’éducation. Les chiffres montrent ainsi que depuis la Moutassarifiya à nos jours, le nombre des femmes ayant fait des études est pratiquement égal à celui des hommes. Malgré tout, leur éducation ne leur a pas permis d’atteindre des postes de décision[3].

Actuellement, les femmes constituent près de 25 % des travailleurs actifs. La majorité de celles qui travaillent sont d’ailleurs concentrées à Beyrouth et au Mont-Liban. Elles continuent toutefois de pâtir de la discrimination du genre et n’obtiennent que rarement de hautes fonctions.

Selon un rapport consacré à cette question rédigé par Marie Bonte, « les femmes qui représentent une partie importante de la masse salariale parviennent difficilement en général à atteindre des postes de décision et à avoir un emploi stable. Elles souffrent d’une discrimination au niveau du genre et de l’ethnie »[4].

Les femmes du Mont-Liban et du pays en général ont pourtant constitué l’élément moteur du travail social et civil et du soutien à la communauté. La majorité des associations et organisations qui se consacrent aux services sociaux et communautaires sont gérées par des femmes. Mais comme d’habitude, on ne voit pas celles-ci aux postes de décision.

La municipalité de Bourj Hammoud, une localité au centre du Mont-Liban, a été par exemple la première du pays à engager des femmes pour la fonction de policiers municipaux. La raison invoquée était que la présence de femmes « au sein de la police municipale consolide les liens au sein de la collectivité et renforce le développement et la paix »[5].

Au cours des dernières élections municipales, on a constaté une augmentation du nombre de candidatures féminines qui ont ainsi défié les familles traditionnelles et les mentalités conservatrices. Le mohafazat du Mont-Liban a ainsi enregistré le plus grand nombre de candidatures féminines pour des sièges municipaux[6] (528) et pour les sièges de moukhtars (156). Dans ce mohafazat, il y a eu aussi le plus grand nombre de sièges remportés par des femmes (246 pour les sièges municipaux et 17 moukhtars). Ces chiffres sont en augmentation de 15 % par rapport à ceux de 2010.

De même, dans les élections législatives de 2018, il y a eu 113 candidatures féminines[7]. Comme la loi électorale en vigueur pour ce scrutin obligeaient les candidats à être inscrits sur une liste, 86 femmes sont restées dans la course jusqu’au bout. Le plus grand nombre de candidatures féminines a été enregistré au Mont-Liban avec 27 femmes[8]. Hélas, au final, seules 6 femmes ont été élues députées et aucune d’elles ne s’était présentée au Mont-Liban.

Tous ces faits montrent que depuis l’aube de l’humanité, la femme a été l’un des piliers du développement durable. Au Mont-Liban, les femmes ont toujours été dans les coulisses de tous les événements. En général, leur présence a constitué une garantie pour une plus grande démocratie et surtout elles ont toujours apporté dans tous les circonstances une vision plus humaine, notamment au niveau des droits de l’homme et des causes économiques, politiques et sociales.

Il est donc temps de donner aux femmes le crédit qui leur revient de droit pour tout le travail qu’elles ont accompli et pour tout ce qu’elles ont donné pour le développement de la société. Il est aussi temps de leur permettre d’avoir une place plus grande pour intervenir et faire évoluer la société en assurant son bien-être.



[2] The role of women in 19th century Mount Lebanon: http://www.alraidajournal.com/index.php/ALRJ/article/view/1141/1134

[4] A gender and ethnic division of labor: https://books.openedition.org/ifpo/13250?lang=en

[5] Women in the Municipal Police Service in Lebanon Representation and Participation: https://procurement-notices.undp.org/view_file.cfm?doc_id=165684

[6] The highest number of women candidates running for municipal seats is in the North Lebanon and Akkar (535 women) with a slight difference of 7 candidates from Mount Lebanon.

[7] Record number of women on the ballot in Lebanon’s first parliamentary elections since 2009: https://reliefweb.int/report/lebanon/record-number-women-ballot-lebanon-s-first-parliamentary-elections-2009

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