Nous ne voyons pas ici beaucoup de paysans libanais, car la main d’œuvre locale refuse de travailler dans les champs, en raison des bas salaires, de la dureté du travail et de l’absence de politiques gouvernementales sérieuses pour soutenir le secteur agricole.
« Avant la guerre, nous travaillions sur une base saisonnière. Ces terres ont été plantées avant les combats et, à l’époque bien sûr, nous n’étions pas des réfugiés. Maintenant, nous affrontons des conditions de vie difficiles, les bas salaires, les mauvais traitements et l'exploitation exercée par ceux qui monopolisent le marché du travail », affirme Karim, 27 ans, un agriculteur syrien ayant fui la guerre pour travailler la terre.
Les femmes œuvrent également aux côtés des hommes dans la culture du sol. Ce genre de partenariat a pris ses origines en Syrie, en raison de la nécessité pour ces familles d’augmenter leurs revenus. Mais cette situation, en particulier au Liban, a accru la difficulté des conditions de travail pour les femmes. Aala’, une de ces Syriennes qui travaillent la terre confie : « Je travaille depuis six heures du matin jusqu’à 19 heures. Nous sommes obligés de rester toutes ces heures pour être en mesure de passer l’hiver, quand il n'y a rien d’autre que le froid et les veillées de famille. Nous désherbons la terre, cultivons les fruits et les légumes, ainsi que divers autres travaux. Le salaire journalier pour toutes ces heures est de 8 000 livres libanaises, mais le gardien responsable qui nous a débrouillé le travail en prélève 2.000 LL, et il ne nous reste plus que 6.000 LL seulement ».
Aala’, seize ans, originaire de la campagne près d'Alep, ne sait ni lire ni écrire. Sa maison a été bombardée et n’est plus aujourd’hui qu’un tas de ruines. Elle vit maintenant dans une petite tente avec sa famille composée de 11 personnes. L’adolescente ajoute : « Je vais me marier le mois prochain, je rêve d'une belle maison et d’une vie décente. Je rêve aussi de voir Damas, que je n’ai jamais connue ».
Les dures conditions de la guerre puis de l’asile ont fortement touché les enfants, qui travaillent eux aussi dans l'agriculture, et beaucoup d’entre eux sont impliqués dans la culture de ces terres. Moustapha, 11 ans, travaille lui aussi le sol avec sa famille : « Je ne me souviens pas beaucoup d'Alep, en revanche je connais le Liban plus qu’Alep. De ma vie je ne suis jamais allé à l'école, et je ne sais ni lire ni écrire. Je sais juste écrire "Allo" sur WhatsApp. J'aime travailler le sol et je suis heureux ici au Liban, j'ai de nombreux amis libanais. J'aime le Liban et la Syrie, et je veux retourner dans mon pays… Je rêve de tout posséder ».
Aala’ (à droite), 16 ans, une réfugiée syrienne d'Alep, affiche les produits récoltés avec sa cousine dans un domaine viticole à Kefraya, dans la Békaa.
Moustapha, 11 ans, lui aussi réfugié d'Alep, portant des paniers dans un vignoble à Kefraya.
Des fermiers syriens procédant à la récolte des tomates dans la Békaa.
Les grappes de raisin qui serviront à la fabrication du vin.
Une petite Syrienne de 7 ans déguste une tomate tout en aidant sa famille durant la récolte.
Une réfugiée syrienne d’Alep en plein travail de la terre.
Un groupe de fermiers syriens réfugiés la Békaa : les dures conditions de l’exil.
Un travail harassant pour 6 000 LL par jour.
L'assemblage des poivrons verts après la récolte.