Je suis une peintre syrienne, j’ai décroché mon diplôme en 2012. J’étais très enthousiaste à l’idée d’ouvrir un petit atelier dans le Vieux Damas, mais je n’en ai pas eu l’occasion pour une raison ou pour une autre. Je n’avais plus d’autre option que Beyrouth, le Beyrouth de Gebran, de Darwiche et de Akl. Voilà pourquoi j’y suis venue, et j’étais prête à m’y retrouver : la ville ne m’a pas déçue, elle m’a accueillie avec générosité, moi qui porte dans mon art l’identité féminine comme un étendard. Mes études sur le thème de la femme sous toutes ses facettes, sur sa relation avec son partenaire, sur la relation entre les sexes, n’ont pas encore satisfait ma curiosité, quatre ans plus tard.
Il ne fait pas de doute que la mixité de cette société et ses relations sont de nature à être une source suffisante d’inspiration. Ces deux facteurs viennent enrichir les sujets de mon art, tout comme l’atmosphère qui règne dans cette ville aide au développement de ma technique artistique puisque, en matière de couleurs, je suis passionnée par la mer, et que ma peinture est éprise du ciel de Beyrouth.
Il n’a pas été très difficile d’imposer mon art dans cette ville, de faire en sorte qu’il y soit accepté, et qu’il soit considéré comme un projet influent et influencé par sa société, étant donné que la jeune Libanaise occupe une part dans mes œuvres. Tous ces facteurs rassemblés étaient au cœur de mon exposition individuelle qui était, par-excellence, inspirée de l’atmosphère de cette ville. Cette exposition a interagi avec elle et reflété la relation qui la lie à ses habitants.
Certains pourraient penser qu’à l’instar d’autres artistes, j’évite le sujet de la guerre et de la destruction qui ravagent mon pays. En réalité, je travaille sur le sujet des relations et de leur teneur, parce que suis convaincue que quand on les met en lumière, soit pour les consacrer, soit pour les critiquer ou pour souligner leur identification à l’espace et à l’existence, on évite beaucoup de guerres et de conflits. Cela pourrait nous permettre de sortir du cycle de la destruction en vue de parvenir à des résultats authentiques et concrets, fondés sur le partenariat et indépendants de tout conflit. De plus, j’ai préféré laisser à d’autres artistes le soin d’aborder le sujet de la guerre à leur manière. Je ne cherche pas à rivaliser avec eux, de peur que ce sujet n’arrive à saturation. Ni mon pays, ni ses habitants, ni leurs souffrances ne sont un sujet de consommation courante, et encore moins d’exploitation.
…Et Beyrouth reste ma source comme elle a été celle de ceux qui m’y ont précédé.