À l’origine de cette initiative, des forces actives du village de Saadnayel, soucieuses d’encourager une cohésion sociale et culturelle. En 2014, celles-ci ont organisé un festival pour les enfants syriens et libanais, sous la supervision des cadres – syriens – du centre, en collaboration avec la municipalité et des jeunes du village.
La directrice générale du centre «Femmes d’aujourd’hui», Majd Charbaji, raconte que le festival «a pris l’allure d’un parc d’attraction gratuit dans lequel des spectacles de danses et des pièces de théâtre ont été présentés». «Nous avions accueilli près de 3.000 petits syriens et libanais, ce qui a permis de renforcer la solidarité sociale entre enfants et adultes à cette occasion», se félicite Mme Charbaji.
De manière plus générale, afin de favoriser la coexistence et la cohésion culturelle, même à un niveau limité, le centre a recruté, pour ses ateliers de travail, des formatrices et des aspirantes à la fois libanaises et syriennes.
Âgée de 24 ans, Ghina, originaire de la Békaa et enseignante de langue française, a donné des cours de français à des femmes syriennes. Elle relate son expérience: «Au départ, j’avais peur qu’elles ne me rejettent parce que je suis Libanaise, une étrangère pour elles. Je pensais que leur état psychologique, dû à la guerre dans leur pays, serait pour moi un obstacle. Mes craintes se sont cependant dissipées quelques jours plus tard, dans la mesure où le courant est vite passé entre nous. Je n’ai pas eu l’impression qu’un barrage nous séparait».
Ghina indique par ailleurs qu’une bonne relation entre les deux populations libanaise et syrienne nécessite un peu de communication pour se développer. «Mes rapports avec mes étudiantes se sont vite transformées en amitié. Nous sommes sorties nous promener ensemble et j’ai fini par suivre de près leur vie au quotidien», confie-t-elle.
C’est ce que confirme une jeune disciple syrienne, Marwa, 25 ans. «Ghina a réussi à s’adapter vite à nous, raconte-t-elle. Elle a imprimé une note de gaieté aux études. Elle reprend un même paragraphe plus d’une fois pour que nous puissions le comprendre. Je ne m’attendais pas à cela d’une dame libanaise. Du coup, mes préjugés ont disparu. Après avoir fait sa connaissance et celle de ses parents, ma mauvaise perception des Libanais a changé».
Pour encourager ce rapprochement et élargir son spectre, le centre a créé en collaboration avec des activistes libanais un club, l’«Académie sportive de la Békaa», intégrant, dans le quartier Jlala, des jeunes libanais et syriens dans une même équipe. Le but de cette initiative est de favoriser leur intégration et de développer leurs talents.
Proche du centre, un avocat, Rami Zammar, 36 ans, révèle que le projet est l’une des initiatives de «Femmes d’aujourd’hui». L’idée lui avait plu parce qu’elle «pave la voie à la cohésion à travers le sport et les compétitions communes régulières, d’autant qu’il existe un manque au niveau des clubs sportifs dans la région». Il s’arrête sur la contribution libanaise en expliquant: «Nous avions offert le terrain. Le centre s’est occupé de la planification et de l’exécution».
Rebondissant sur le sujet, Mme Charbaji précise que le club sera bientôt prêt. Selon elle, il permettra de développer le sport libano-syrien et de protéger les jeunes contre l’intégrisme, le racisme et les problèmes sociaux.
Il convient de préciser que de nombreuses initiatives similaires ont vu le jour récemment dans la partie centrale de la Békaa, avec pour objectif de favoriser la coexistence entre les deux populations libanaise et syrienne. Citons entre autres, le centre culturel de Kfar Zabad, parrainé par l’ONG World Vision, et les sessions de formation aux compétences professionnelles organisées par l’association «Save the Children» dans les villages de Bar Elias et Qab Elias.