«Il est également inutile que le dossier de l’afflux syrien soit un facteur de tiraillements politiques, une marchandise qu’on exploite ou qui sert de monnaie d’échange, encore moins un espace pour les guerres intérieures, avait-il ajouté. C’est une cause qui porte atteinte aux intérêts de tous les Libanais. Cela nécessite qu’on s’entende sur une solution qui dépasse les clivages et la polarisation». M. Derbas avait aussi estimé qu’il s’agissait «d’une cause nationale qui nécessite la déclaration d’un état d’urgence politique, c’est-à-dire la mobilisation de toutes les capacités nationales quelles que soient leurs appartenances». «Cette affaire est suffisante pour unifier la volonté libanaise», avait-il souligné.
Des propos séduisants et importants à la fois. On doit peut-être au ministre Derbas la décision du Liban de limiter l’exode, puisqu’il était impossible que des ministres d’autres communautés adoptent le projet, pour éviter qu’il ne prenne des dimensions confessionnelles, en plus de ses dimensions humaines. Celles-ci doivent, en tout cas, être prises en considération, d’autant que l’application de ces mesures doit être suspendue lorsqu’il s’agit de vies humaines menacées de mort. Après tout, les lois ont été promulguées pour le bien de l’homme, et non le contraire.
La proposition du ministre peut toutefois rester lettre morte, si aucune partie n’adopte les solutions ou ne mette au point une vision dans ce sens. L’élaboration d’un avant-projet, qui sera mis en application au terme d’un débat exhaustif, est nécessaire, et cela avant que l’exode syrien ne se transforme, à l’instar de celui des Palestiniens, en un exode à la fois temporaire et permanent. La Syrie fait face à une crise grave. On ne voit pas de solution à l’horizon. Peut-être, comme certains le souhaiteraient, il y aura une partition du pays. Le cas échéant, cela empêchera le retour de nombreux réfugiés dans des régions ou à l’intérieur de mini-États qui leur seraient inhospitaliers.
Ainsi, l’appel du ministre des Affaires sociales à déclarer un état d’urgence politique pour traiter ce dossier épineux est urgent, malgré toutes les crises par lesquelles passe le Liban, puisque l’exode en soi constitue une bombe à retardement. Il pourrait être demandé au ministre Derbas de commencer par organiser des ateliers de travail, auxquels participeraient également des Syriens, afin de mettre des cadres clairs pour le traitement de ce dossier, de manière à préserver les droits du Liban, ainsi que la dignité et les droits humanitaires des Syriens.