Le livre « Soupe pour la Syrie » regorge de photos vivides de plats de soupe, et de visages qui vous regardent à travers les pages en papier glacé. Les regards ne sont pas accusateurs, ce sont des yeux d’enfants qui vous sourient, et des yeux de femmes qui vous parlent. Pour Barbara Abdini Massaad, « les regards des gens brisent les barrages de la haine ».
La nationalité, la religion, le lieu de provenance de la personne, et le camp qu’elle appuie dans la guerre syrienne, deviennent alors des détails sans importance.
Au delà de la condition minable du camp, à travers les visages durcis par les épreuves, les émotions et les difficultés du quotidien, ce sont des gens qui sont comme nous… des humains, tout simplement. Leurs regards intenses – attribut dominant dans les photos du livre – dénotent un rapport avec la photographe, et répandent la chaleur dans les pages et dans le cœur.
Cet ouvrage serait un reflet de la personnalité de Barbara sur du papier : il traite de deux sujets qui lui sont chers, la cuisine et la photographie. Il révèle une nature humaine et généreuse, et une fluidité de la compassion et la contigüité.
La générosité est la norme dans la culture culinaire
Comme il se doit pour toute œuvre caritative, ce projet s’établit sans encombre. Le choix de la soupe comme met est symbolique : il s’agit du plat qui, par-excellence, évoque la chaleur et la convivialité, un plat autour duquel se rassemblent beaucoup de gens. Barbara a invité ses voisins et amis à lui envoyer leurs recettes, d’une part pour garnir les pages d’un livre de recettes, et d’autre part pour assurer la pérennité de ses visites hebdomadaires aux réfugiés.
C’est au cours d’une conversation sur son initiative, autours d’un dîner à Londres, que Barbara a montré esquisse du livre à Michel Mouchabbak. Ce dernier lui avait déjà publié un livre de cuisine intitulé « Mankouché, à l’intérieur d’une boulangerie libanaise au coin d’une rue ». Tout de suite il compatit lui qui est d’origine palestinienne et dont la famille a fui au Liban puis aux États-Unis, les guerres qui la poursuivaient. Ainsi, « Soupe pour la Syrie » commence à se concrétiser.
En vue d’optimiser le projet, la maison d’édition « Interlink Publishing » et Barbara Massaad entrent en contact avec leurs connaissances respectives, ainsi qu’avec des chefs à la renommée mondiale, pour leur demander d’envoyer leurs recettes et suggestions. Des cuisiniers amateurs tout comme des chefs professionnels ont mis la main à la pâte par leur contribution et ponction.
Des centaines de recettes recueillies, seules 80 ont été sélectionnées pour figurer dans les 208 pages du livre. Sur ce processus, Barbara Massaad précise que « les critères de choix des recettes étaient la facilité d’exécution et leur commodité ». Ainsi, elle reçoit chez elle, au cours de cette étape -« la plus plaisante de l’expérience », une équipe de dix personnes pour tester et concocter les soupes.
De grands noms du monde de la cuisine ont contribué à ce livre, notamment des auteurs et des critiques de renom (tel Mark Bittman, Anthony Bourdain, Sally Batcher, Jreige Maalouf, Paola Wolfert), des personnalités du monde de la télévision, de célèbres restaurateurs, des blogueurs spécialisés dans la cuisine, ainsi qu’un nombre d’amateurs de bonne chère comme Pascale Harès, qui a fait le design graphique du livre.
Les participants ont aussi fait usage des réseaux sociaux pour promouvoir la cause adoptée, ce qui a aidé à faire connaître le projet et à collecter les fonds nécessaires. Ils ont également encouragé l’interaction autour de photos et de commentaires sur les recettes qu’ils ont fournies.
Même avant son lancement officiel, les ventes du livre se sont avérées prometteuses. l’éditeur s’attendmeme selon Massaad, à ce que le nombre de copies vendues à travers le monde atteigne les 250 000 exemplaires. Dans ce contexte, la cérémonie de collecte de fonds qui a eu lieu à Beyrouth pour la signature du livre a comporté de nombreuses activités, notamment une exposition de photos, des stands pour la dégustation de soupes, et la vente de gâteaux en présence de plusieurs collaborateurs à l’ouvrage. Des volontaires ont offert le lieu où s’est déroulée la cérémonie et les fournitures nécessaires pour la dégustation de soupes, ainsi que le coût d’impression des posters et des photos exposées. Il est prévu que, dans les mois qui viennent, plusieurs occasions similaires soient organisées autour du livre « Soupe pour la Syrie », notamment des cérémonies de signature de l’ouvrage aux Pays-Bas, et Séoul, en marge du festival « AsiO Gusto », accompagnée d’une table ronde dans le cadre d’une « Table pour la paix ».
Par ailleurs, le site Internet de « Soupe pour la Syrie » (http://www.soupforsyria.com) encourage les internautes à s’impliquer dans une multitude d’activités proposées, comme les « fêtes à thème de soupe », des initiatives individuelles pour vendre le livre, ou encore celles dans le cadre d’autres activités locales.
Toutefois, le plus utile reste l’achat du livre de recettes directement sur le site. Car c’est dans ce cas-là que les bénéfices versés à 100 % Haut-commissariat des réfugiés de l’Onu, comme contribution à l’assistance humanitaire de l’agence, en vue de financer certains cas médicaux non couverts par celle-ci.