Je suis la Syrie ! Je prends ma source dans les eaux de l'océan Atlantique et je m'infiltre, perdu, abandonné, misérable, incapable d'agir, apathique, acquiesçant au le destin, aussi énorme soit-il, sans action, sans réagir, jusqu'à arriver à l'océan Indien.
Je suis la Syrie ! Qui est Arabe si ce n’est moi ? Je suis la Syrie. Je suis venu d'Irak, de Palestine, de Djibouti, des camps de misère au Liban, des dédales de la pauvreté dans chaque terre arabe.
Je suis la Syrie ! Je suis les fils des nouveaux camps de la terre, et je suis ses terroristes.
Je ne suis que des rassemblements de femmes et d'enfants rodant, malheureux, dans les rues de Beyrouth ; je ne suis que des jeunes, d'un âge moyen, qui entassent leurs enfants, leur argent, leurs biens, et ce qui leur reste de chair vivante, dans des embarcations de fortune, prenant le large vers l'inconnu, vers les naufrages mortels en Méditerranée, vers l’humiliation aux frontières des États occidentaux. Je suis les nouveaux terroristes du globe, banni de ses paradis.
Je suis le terrorisme, je suis ses victimes.
Je suis le loyaliste, je suis l'opposant. Je suis perdu dans des discussions byzantines sur les causes et les effets, pendant que mes enfants sombrent dans des mares de sang. Je suis l'innocent, victime du «jeu des nations», alors que mon doigt tire sur le déclencheur, ouvrant le feu en direction de visages que j’ai dépourvu de noms.
Je suis les pieds-nus des villes qui arpentent les rues, hébétés, comme des orphelins; êtres chers qui ont été humiliés; ne pardonne pas ceux qui les ont forcés à l'exode… car ils savent ce qu'ils font. Ne me pardonne pas, Père Tout Puissant car je n'ai pas fait face à ceux qui m'ont dépouillé.
Je suis la Syrie ! Je suis les rues de jasmin paisibles ou a été lâché le démon. Un démon qui s’étend aujourd’hui dans les quatre coins du monde.